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Représentations sociolinguistiques dans le roman postmoderne Tè Mawon : hybridité des pratiques langagières dans une dystopie technocratique
Alexia Jingand  1@  
1 : Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française
Centre National de la Recherche Scientifique - CNRS, University of Lorraine, France

Tè Mawon (Roch, 2022) est une dystopie dans laquelle la technologie rassemble autant qu'elle divise. Plurilinguisme et variation francophone interlectale fictive y côtoient innovations techniques. L'auteur propose ainsi une réflexion sur la manière dont les technologies déconnectent les individus de la nature et influencent les langues, tissant un lien entre société, citoyens, et pratiques langagières dans des va-et-vient entre passé primitif, présent artificiel et aspirations à un futur plus authentique, quête d'un retour aux racines. Cette communication propose d'aborder les représentations sociolinguistiques qui sont mises au jour dans le roman, tout en interrogeant la manière dont la société artificielle influence langues et pratiques langagières dans l'imaginaire de Roch.

Les représentations sociolinguistiques (Jodelet, 2003), l'imaginaire linguistique (Houdebine, 2002) et les stéréotypes de lecture (Dufays, 2010) constituent le cadre théorique de cette recherche. Ces notions permettent d'exploiter l'imaginaire de l'écrivain comme écho de représentations collectivement partagées. Notre analyse s'envisage également dans la perspective de la linguistique populaire (Preston, 2008), qui reconnait la validité des réflexions sur la langue et les pratiques langagières exprimées par les locuteurs non savants, mais pas moins experts de leur langue. L'écrivain en particulier s'engage dans un processus métalinguistique fortement conscientisé.

Nous menons une analyse de contenus à des niveaux syntagmatique et paradigmatique. Les résultats font état (1) d'une société dans laquelle artifices technologiques et variations linguistiques vont de pair, (2) d'un imaginaire d'un écosystème linguistique pétri d'innovations artificielles et (3) d'enjeux sociolinguistiques induits par un tiraillement des locuteurs fictifs entre naturel et artificiel. Le plurilinguisme dans une société connectée, l'économie des pratiques langagières, notamment l'influence des technologies sur des métiers comme interprète, la verticalité de la société divisée entre un « Anba » et un « Anwo » constituent autant d'éléments romanesques qui se prêtent à une lecture des représentations sociolinguistiques.

Pour conclure, l'auteur conçoit l'influence des technologies sur les pratiques langagières, même lorsqu'elles ne concernent pas initialement la langue. Le thème du retour à la nature prend des dimensions de quête socio-identitaire où la langue joue un rôle primordial, et passe par des pratiques étymologiques ainsi que le recours à des mythes ancestraux. Le roman invite ainsi à repenser la distinction entre artificiel et naturel, sans doute elle-même artificielle.

Bibliographie indicative

 Corpus

Roch, M. (2022). Tè Mawon. La Volte.

 Bibliographie critique

Jodelet, D. (2003). Les Représentations sociales. Presses Universitaires de France.

Houdebine, A.-M. (2002). L'Imaginaire linguistique. L'Harmattan.

Dufays, J.-L. (2010). Stéréotype et lecture : essai de la réception littéraire. Peter Lang.

Preston, D. (2008). Qu'est-ce que la linguistique populaire ? Une question d'importance. Pratiques, 139-140, 1-24.


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